mardi 19 mai 2015

Homosexualité et protestantisme


Ce fut un scoop pour beaucoup, le 17 mai 2015, lorsque l’une des principales dénominations du protestantisme français (EPUdF) a donné le feu vert à une « bénédiction » des mariages homosexuels.

Confusion

Depuis, une certaine confusion règne dans les médias. D’abord, par le titre même de cette dénomination. « Église Protestante Unie de France » pourrait donner l’impression qu’elle regroupe l’ensemble du protestantisme. En regardant de plus près, il s’agit de la fusion en 2013 des « ex » Églises Réformées et Luthériennes. Cette union revendique environ 110.000 membres actifs. Pour donner un ordre d’idée, le CNEF regroupant une grande partie du courant évangélique du protestantisme français, revendique 400.000 membres actifs.
Deuxième confusion, les médias ont souvent simplifié la déclaration détaillée pour ne retenir que la « bénédiction des couples homosexuels ». Le point 4.2.1 de cette déclaration nuance quelque peu les propos en soulignant que cette « bénédiction » ne fera pas l’unanimité dans les Églises. « C’est le témoignage des Écritures qui font de l’amour fidèle d’un couple hommefemme une parabole de la fidélité de Dieu pour son peuple. Mais, nous n’en tirons pas tous les mêmes conséquences : pour certains, seuls de tels couples peuvent être bénis liturgiquement, tandis que pour d’autres, la bénédiction de Dieu ne saurait être liée à l’orientation sexuelle ».

Décision préparée de longue date

Il n’y a rien de bien nouveau dans ces affirmations.  Par exemple, en 2004, bien avant le mariage pour tous, la Communion Protestante Luthéro-Réformée (CPLR) avait exprimé sa grande ouverture dans l’accueil des homosexuels dans une déclaration, tout en affirmant qu’il n’était pas, à ce moment-là, opportun d'envisager un culte de bénédiction qui entretiendrait la confusion entre couple homosexuel et hétérosexuel. 

Avons-nous la même Bible ?

Plusieurs personnes se demandent pourquoi le protestantisme peut aboutir à des conclusions si différentes, entre par exemple l’EPUdF et le CNEF, alors qu’il n’y a une seule Bible. La réponse est assez simple, la Bible n’est pas lue de la même façon, selon les « présupposés » des différentes Églises protestantes.
Une phrase est révélatrice dans la déclaration de mai 2015 : « Sans figer les Écritures dans la lettre d’une loi immuable, elle (l’EPUdF) entend être fidèle à l’Évangile de JésusChrist et à son  exigence, fondement de sa foi et de son espérance » (1.4). Par crainte de « figer les Écritures », une partie du protestantisme se distancie dangereusement du contenu de la Bible. D’ailleurs, que pouvons-nous connaître de « l’Evangile de Jésus-Christ et de son exigence », si nous ne prenons pas au sérieux ces textes bibliques.
En creusant davantage, on découvre un raisonnement proche de celui des Sadducéens, à l’époque de Jésus, qui ne croyaient ni aux anges, ni à la résurrection (Mc 12.18-27). Leur « raison » et leur « sagesse » étaient placées subtilement au-dessus de la révélation biblique. Pas étonnant que Jésus leur réponde : « N’êtes-vous pas dans l’erreur, parce que vous ne comprenez ni les Écritures, ni la puissance de Dieu ? ».
Un certain nombre de protestants de renom ont pris du recul face aux affirmations bibliques et leur application dans les débats (bio)éthiques. Denis Müller dans l’Encyclopédie du Protestantisme (article bioéthique) affirme : « Il est toujours sage de commencer avec des principes scripturaires les plus larges possibles, qui sont énoncés tout au long de la Bible. Il n’est pourtant que trop manifeste que le développement de la bioéthique théologique a coïncidé avec des remises en question des écrits bibliques, de leur autorité et de leur interprétation. L’idée d’une unité de la Bible a été sérieusement contestée… ».
Les approches « pseudo-scientifiques » comme la lecture « historico-critique » ont cherché à contester la dimension divine de l’inspiration biblique, et donc l’unité de ce texte. De ces raisonnements, il est facile de réinterpréter la Bible pour la conformer à l’air du temps.
Pour une autre partie du protestantisme, en évitant de glisser dans un littéralisme naïf, la Bible fait autorité. Jésus dit lui-même : « Le ciel et la terre passeront, mais mes paroles ne passeront pas » (Marc 13.31). Le Christ affirme la cohérence absolue des Écritures (pour l’Ancien Testament) et sa pleine inspiration (Mat 5.18), même s’il en donne une compréhension renouvelée à la lumière de ses paroles et de son œuvre.
Pour faire simple, le protestantisme appelé « évangélique » maintient haut et fort son attachement à la Bible en tant que révélation divine donnée à l'humanité. Ce statut de l'Écriture a été abandonné par une partie significative du protestantisme. 

Faire le bon choix

Comme autrefois, Jésus ne force personne à le suivre, mais comme il l’affirme dans ses paroles d’envoi à ses apôtres : « Tout pouvoir m’a été donné dans le ciel et sur la terre. Allez, faites de toutes les nations des disciples… enseignez-leur à observer tout ce que je vous ai prescrit » (Mat 28.19-20). On peut difficilement se réclamer du Christ, sans chercher à observer tout ce qu’il nous a prescrit. Si l’enseignement de Jésus nous encourage à l’accueil à la compassion de notre prochain, il n’abolit en rien les repères moraux de la Loi mosaïque, notamment sur le sens du mariage exclusivement entre un homme et une femme (Mat 5.17 ; 19.5). Son enseignement se prolonge dans le reste du Nouveau Testament notamment en Rm 1.26-28, 1 Co 6.9, 1 Ti 1.9, où l’homosexualité, avec d’autres dérives, est condamnée sans ambiguïté.
En attendant que soit publiés les actes de l’Assemblée Générale de 2014 abordant plus en détail la question de l’homosexualité, nous renvoyons au pertinent communiqué du CNEF suite à la déclaration de l’EPUdF.

Reynald Kozycki
Président du Réseau FEF

Texte relu et approuvé par l’ensemble du comité national

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