Nuit tragique à Paris
« J’ai observé encore toutes les injustices qui
existent ici-bas. Les opprimés crient leur détresse et personne ne leur vient
en aide. Le pouvoir est du côté des oppresseurs, si bien que personne ne peut
leur venir en aide » (Ecl 4.1 BFC)
J’étais aussi à Paris le vendredi
13 novembre. Nous avions organisé un concert avec notre Église des Gobelins. À
la fin de la soirée, en attendant un bus, nous étions étonnés avec ma femme du
nombre d’ambulances, de voitures de police qui se succédaient dans les rues du
13e et 5e. La ligne RER B était perturbée avec comme
seule indication : Un colis suspect trouvé à Châtelet. En arrivant
à Palaiseau, beaucoup plus tard que prévu, nous avons appris le drame qui se déroulait.
Oppression
En méditant depuis plusieurs jours sur le livre de
l’Ecclésiaste (ou Qohelet), j’ai été interpellé par la sagesse de ses propos. Le
diagnostic récent de mon cancer grave me confirme, de manière plus aigüe, la
brièveté de la vie et la vanité de tant de choses qui nous entourent. Le
Qohelet, plutôt pessimiste, n’est pas surpris par tous les dérèglements de
notre humanité, voire de nos vies. À propos de l’organisation sociale, politique
et idéologique, il relève le pouvoir de l’oppression. Je réfléchissais à
l’histoire des conquêtes des siècles passés, les grandes invasions, l’établissement
de la Royauté en France, la Révolution, Bonaparte, la Colonisation, le Communisme,
le Nazisme… On aurait pu penser que le Siècle des Lumières et le culte de la Raison
allaient apporter la solution à la violence et l’oppression humaines. Cette
illusion a été sérieusement bousculée au XIXe et surtout par les dizaines de
millions de morts des deux grandes guerres mondiales au XXe siècle (record
absolu de l’histoire). Le XXIe siècle a déplacé les sources de conflits, mais
ne s’annonce pas mieux que les précédents. Pour notre pays, depuis la guerre
d’Algérie, nous n’avions pas connu de période plus troublée que celle dans
laquelle nous sommes entrés le 13 novembre 2015.
De nombreuses idéologies véhiculent une violence sournoise.
L’héritage des Lumières dont nous pouvons être fiers pour de nombreux aspects
(respect de la vie humaine, une certaine forme d’égalité, la liberté de cultes
et de conscience…) peut avoir aussi ses travers (la revendication excessive de
ses droits au détriment de ses devoirs, la liberté de critiquer tout et
n’importe quoi, une dérision parfois des questions « religieuses ou
spirituelles »…). ll est surprenant que le début de l’attaque terroriste
au Bataclan se soit faite pendant l’un des chants emblématiques du groupe Eagles
of Death Metal : « Kiss the Devil » (« Embrasse le
diable »). Il est une Invitation pressante à s’unir au diable et à se
vouer à lui. Même si le sujet relève peut-être plus de la moquerie ou de la
dérision par ce genre de groupe, ce jour-là, comme de nombreux journalistes
l’ont relevé, les musiciens ont dû être les premiers surpris, pour ne pas dire
terrorisés, par une présence « diabolique » presque palpable.
Les djihadistes de Daesh combattent violemment toute
idéologie en dehors d’un Islam radical où les multiples appels du Coran à la
haine des mécréants, juifs et chrétiens sont pris à la lettre. Les valeurs des
Lumières, si présentes en France, étant totalement à l’opposé de leurs
croyances, doivent impérativement être détruites pour eux. Nous condamnons
évidemment ce genre d’actes terroristes et nous nous joignons sans réserve à
cette solidarité envers les familles endeuillées et cette compassion envers les
nombreuses victimes, encore vivantes, pour qui le traumatisme laissera des
traces indélébiles.
L’histoire de ce monde est une série de confrontations entre
idéologies afin d’opprimer les peuples et conquérir le pouvoir comme le relève
l’Ecclésiaste.
Y a-t-il une solution ?
Pour l’Ecclésiaste, le seul petit espoir se trouve dans ce
qu’il appelle « la crainte respectueuse de Dieu » (12.13-14). Elle
est même le commencement de la sagesse dans la Bible. Une réponse plus précise se
dévoile dans l’accomplissement des temps que le Messie apporte selon les nombreuses
prophéties de l’Ancien Testament. Il est venu régler la situation de
malédiction de l’humanité en devenant lui-même malédiction (Ga 3.13 ; Es
53…), et inaugurer un âge nouveau qui commence par la foi en lui aujourd’hui et
s’accomplira pleinement lors de son retour.
La Bible, à l’image de l’Ecclésiaste, est très pessimiste
sur l’histoire et le devenir de l’humanité. Jésus, dans ses nombreuses
prophéties, parle du développement du mal avec un summum dans la mystérieuse « abomination
de la désolation ». Ce sera une sorte de totalitarisme mondial qui
précédera son retour (Mat 24-25). Sa mise en garde principale, dans ce
contexte, est la puissance de mensonge et de séduction qui manipulera la
société sur les fausses solutions, les faux messies... Dans cette confusion à
venir, une chose restera selon Jésus : « Le ciel et la terre
passeront, mais mes paroles ne passeront pas » (24.25). Son retour verra
la victoire définitive décrite dans l’Apocalypse : « Il essuiera
toute larme de leurs yeux, la mort ne sera plus, et il n’y aura plus ni deuil,
ni cri, ni douleur, car les premières choses ont disparu… » (Ap 21.4)