lundi 25 janvier 2016

Le Sermon sur la montagne et nos dérèglements

Cet article est une adaptation d'une étude à paraître dans la revue revue Servir en L'attendant
Lieu habituellement reconnu en Galilée pour l'emplacement de ce sermon. Photo RK

Contexte du sermon

L’évangile selon Matthieu introduit le Nouveau Testament. Il décrit de nombreux accomplissements de prophéties, notamment par la généalogie de Jésus, par sa naissance miraculeuse, par le sens même de son nom qui se traduit, selon l’ange : « Celui qui nous sauve de nos péchés »… La haine du monde s’exprime de manière violente dans l’attitude d’Hérode au chapitre 2. Le message de Jean-Baptiste (chapitre 3) annonce l’accomplissement du Royaume de Dieu, à la fois dans le jugement qui se prépare, et dans le salut qu’apportera le messie. Il reprend l’ambiguïté de l’annonce très fréquente des prophètes du « Jour de l’Eternel ». Puis Jésus débute son ministère en reprenant le même thème du Royaume, accomplissant de nombreuses délivrances (4.23-25).

Au cœur du sermon

Les chapitres 5-7, appelé aussi « Sermon sur la montage » à cause de son introduction, présente une longue prédication de Jésus, ou plutôt, une synthèse inspirée par l’Esprit, d’enseignements divers, regroupés sous quelques thèmes. Ils sont généralement reconnus comme l'un des sommets de la littérature biblique. Il serait présomptueux d’en faire un résumé. Je vous propose néanmoins de tenter de faire ressortir quelques aspects de ces chapitres.
Pour des raisons pédagogiques, on peut axer ce « sermon » autour du verset : « Car, je vous le dis, si votre justice (ou votre façon de vivre la foi) ne surpasse pas celle des scribes et des pharisiens, vous n’entrerez jamais dans le royaume des cieux » (5.20). Comme plusieurs, je considérerai ces trois chapitres comme un développement du message résumé au chapitre précédent : « Dès lors Jésus commença à proclamer : Changez radicalement (ou repentez-vous), car le règne des cieux s’est approché ! » (4.17 NBS).
Ce sermon n’est pas un traité sur la grâce, mais plutôt un descriptif des conditions d’accueil du Règne des cieux, ou de la vie céleste à travers le roi. Il est vrai que la première béatitude donne une clé sur l’importance de la grâce reçue avec humilité : « Heureux ceux qui sont conscients de leur pauvreté spirituelle, car c’est à eux que le Royaume des cieux est réservé » (5.3, Parole Vivante).
La première section de ce sermon (5.1-16) n’aborde pas nos dérèglements de manière directe, mais le fait par un renversement des valeurs habituelles de ce monde, ou de la piété de son temps, pour mieux faire ressortir les valeurs quasi-opposées que le Maître attend du disciple.

Jésus et la Loi

La 2e section (5.17-48) aborde le rapport de Jésus à la Loi. Il ne vient pas l’abolir, mais l’accomplir et lui donner tout son sens. Il relève notamment 6 dérives dans les interprétations rabbiniques courantes qui minimisent l’impact de la Loi dans les relations sociales (5.21-48). Jésus touche au cœur du péché dans sa réinterprétation des textes. Plus qu’un prophète, il affirme : « Vous avez entendu dire, mais moi je vous dis ». Jésus démasque les péchés, non seulement dans les actes, mais avant tout dans le cœur. Il traite du mépris de son prochain (21-26), de l’adultère (27-30), de répudiation (31-32), du serment et du mensonge (33-37), de la vengeance (38-42), de la haine des ennemis (43-48). Le choix des péchés se focalisent volontairement sur la 2e table de la Loi, qu’il résume ailleurs par : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même » (22.39).

Dieu ou Mamon

La section suivante (chapitre 6) est consacrée à la 1ère table de la Loi, aimer Dieu de ton cœur. Il montre que la justice des pharisiens ne se préoccupe que du regard des hommes, et derrière les apparences, davantage de « Mamon » que de Dieu. Négliger ou mépriser la gloire de Dieu dans trois exercices de piété (6.1-18), ou dans la question de nos biens matériels (19-34) est, pour Jésus, incompatible avec une vraie piété. Notre justice peut dépasser celle des pharisiens si nous sommes disposés à nous préoccuper davantage du Règne de Dieu et de ce qui est juste à ses yeux (6.33).

Sens dévoilé du sermon

 Au chapitre 7, Jésus revient dans un premier temps sur l’esprit de jugement nous plaçant au-dessus des autres, et la foi authentique dans la prière (1-12). Je verrais dans la fin du chapitre, une conclusion en plusieurs étapes. Les versets 13-14 reprennent le thème fréquent des deux voies (Deut 30, Ps 1…), en exhortant puissamment à faire le bon choix. La repentance est sous-entendue, mais aussi l’urgence à prendre plaisir à la Parole de Dieu (comme le Ps 1), déclinée par la méfiance face aux faux prophètes (7.15-20), la préparation au grand jour du Jugement (21-27) qui s’établira sur le critère de notre accueil des Paroles du Roi.

Conclusion

Pour résumer, notre justice doit impérativement dépasser celles des pharisiens concernant l’amour pour notre prochain et l’amour pour Dieu. Nous disions que la grâce apparaît en filigrane dès la première béatitude, mais se développera dans les chapitres suivants, en particulier, dans les 10 miracles des chapitres 8 et 9. Vouloir vivre cette piété du sermon sur la Montagne nous place face notre incapacité totale face à notre impureté. Comme le lépreux (8.1-3), nous supplierons le Seigneur d’avoir piété de nous. Il ne nous repoussera pas, nous « touchera » quitte à enfreindre toutes les règles de pureté. Si l’humilité et la foi sont présentes, il nous purifiera aussi. Lui qui n'a jamais connu le péché, il a accepté, à la Croix, de devenir péché pour nous purifier, et pour que notre justice puisse dépasser celle des pharisiens (2 Co 5.21).
RK

Pour ceux que cela intéressent, voici un lien pour écouter de ma dernière prédication sur un survol de Pierre, et un commentaire du début du chapitre 5.

mercredi 6 janvier 2016

2016, un nouvel an "de grâce"


C'était l'expression consacrée pour parler d'une année, au moins jusqu'à la fin du XVIIIe dans presque tous les pays occidentaux. Elle vient très probablement de ce texte biblique de la première prédication de Jésus à Nazareth selon l'évangile de Luc :

« L'Esprit du Seigneur est sur moi, parce qu'il m'a conféré l'onction pour annoncer la bonne nouvelle aux pauvres ; il m'a envoyé pour proclamer aux captifs la délivrance… pour proclamer une année d'accueil (ou de grâce) de la part du Seigneur ». Luc 4.18-19 (NBS)

Photo RK, Prédication dans une ancienne synagogue à Nazareth

Alors que l'état d'urgence se poursuit avec ses rappels réguliers dans les médias du terrorisme que notre pays a vécu en 2015, ces paroles de Jésus tranchent. Elles font retentir la Bonne Nouvelle, encore plus actuelle en ce début d'année. Il proclame la délivrance désormais accessible à l’humanité, tout au moins à ceux qui sont suffisamment humbles et pauvres pour l’accueillir. Une année de grâce est encore inaugurée, plus exactement, une année « acceptable de la part du Seigneur », une année de « faveur, d’accueil ». Dieu peut répandre librement sa bénédiction parce que Jésus a rendu ce temps acceptable devant son Père en payant la dette pour nos fautes.
Jésus cite une prophétie d'Esaïe 61, et volontairement, il arrête la lecture à « l'année de grâce » coupant ainsi la phrase, et oubliant volontairement les mots suivants : « Le jour de vengeance ». Ce n'était pas au programme de sa première venue, Ce le sera lors de sa seconde.

Bonne année de grâce à chacun.

Voici un lien pour une série de 4 prédications données sur ce thème pour le début d'année 2014 à un camp famille à la Villa Emmanuel.

N.B. Je suis toujours étonné et encouragé lorsque d'autres personnes découvrent plus concrètement dans leur vie, et dans leur fin de vie, le trésor de l'Evangile. Récemment, tous les médias se sont fait l'écho du parcours atypique d'un artiste de variété. Alors qu'il affrontait un cancer, Michel Delpech a dévoilé au public en 2014 sa foi, son amour pour Jésus-Christ et son grand intérêt pour la théologie, dans un ouvrage intitulé « J’ai osé Dieu ». On peut bien-sûr chercher la petite bête et ne pas être d'accord avec tout. Mais son témoignage a quelque chose d'authentique. Il affirmait notamment :
« Je sais que ce langage est difficilement audible, venant d’un chanteur populaire. Un chanteur de variétés qui lit les Pères de l’Église et ceux du désert est-il crédible ? Une star qui cultive sa vie intérieure en se passionnant pour la théologie a-t-elle le droit de dire qu’il ne s’agit pas d’une toquade passagère ? Je m’y risque quand même parce que je sais que si je m’en allais sans jamais en avoir parlé, j’aurais des regrets...Dieu attend toujours que nous venions à lui. Il n’est pas rancunier. Il nous reçoit même si on le fait patienter »

Son dernier succès et en même temps son "adieu".